1
Coeurs d’artistes. — En place de ces cavités humides, de ces souterrains pauvrement éclairés : des galeries à l’air vif et profusément illuminées… de l’art… des aurores, des splendeurs — des éruptions solaires dans tous ces cœurs.
2
Exploits physiques. — A : Certains individus sont insupportables à ce point qu’il faut plusieurs jours à mon organisme pour récupérer. — B : Tu parviens donc à les tolérer ! Combien j’admire le remarquable athlète que tu es devenu !
3
Pollution lumineuse. — Les villes du monde dans la nuit crachent leurs feux. La pollution lumineuse1 étend ses bras dévastateurs ; des membres qui, continûment, s’allongent et s’enflent, envoyant leurs dons abondants vers l’espace. On bâtit des canons à lumière, use d’éclairages décoratifs, de lampadaires innumérables ; mais, dans les rues, ce ne sont pas des étoiles qui courent et scintillent : les habitants des cités, des campagnes et des coins les plus reculés sont bien fréquemment des cœurs éteints, des ombres criantes, des âmes polluées. « … quand donc comprendra-t-on que la nuit peut se faire aussi dans le monde moral, et qu’il faut allumer des flambeaux pour les esprits ! » déclarait Hugo. — Quand donc !
4
Séduction fatale. — Le pouvoir, le prestige, l’argent… Les lumières et les flammes artificielles séduisent de nombreuses âmes nocturnes et, en un battement d’ailes, elles sont capturées. — Lorsque ces sources étincelantes s’installent, dans le temps, ce sont des filets qui se forment, secrètement.
5
Détracteur. — Un individu s’adressant à un auteur lui dit ceci : « Quelle valeur a donc votre œuvre, elle qui n’est que le reflet de vos souffrances intérieures ? Comment pourriez-vous croire qu’avec tant de subjectif on peut toucher l’universel ? » Sans lever la tête, son interlocuteur lui répond dans un calme inouï : « Ne vous a-t-on jamais informé que “le désir d’écrire naît toujours d’une blessure2” (A. Maalouf) ? Se tiendrait-il devant moi, sans que je le sache, le premier surhomme ? Cet être qui, naturellement, et sans posséder de tare, en ressentant la douleur d’autrui ne sentirait point la sienne propre ? Réellement ? »
6
Circuits déconnectés. — Ce qui doue d’une sorte de vie le cœur des êtres ? La hiérarchie et la compétition, au lieu de la collaboration et de l’émulation. Et, tout ceci, pas seulement à l’égard des humains, mais aussi vis-à-vis des êtres vivants autres et, bientôt, de l’artefact machinique.
7
Multitude silencieuse. — « Daniel n’a pas vraiment de place, il circule dans le monde, éternel voyageur, sans domicile fixe3 », écrit Olivia Rosenthal. Des « Daniel », émancipés de la tutelle des signaux trompeurs, des réseaux, des champs artificiels et superficiels des sociétés, vivant à côté des hommes, les croisant le plus souvent tels des fantômes, — il s’en trouve un bon nombre. Et même si la plupart s’ignorent, ils sont bien présents, ces ensembles à l’écart, ces groupes singuliers… ces essaims de consciences silencieuses.
-
Concernant la pollution lumineuse, cf. Wikipédia, « Pollution lumineuse », disponible sur
-
Amin Maalouf (écrivain franco-libanais, élu à l’Académie française en 2011), « L’invité. Entretien avec Amin Maalouf », Nectart, deuxième semestre 2016.
-
Olivia Rosenthal (écrivaine et professeure de littérature à Paris VIII), « Portraits de novembre », Revue des deux mondes, juin 2016.
Photo © iStockphoto.com / cineuno
Laisser un commentaire