Qu’il s’agisse de la nature du temps, de l’espace et de la matière ; de gravité quantique à boucles ou de cordes ; qu’il s’agisse de la capacité ou de l’incapacité de l’intelligence à tendre vers une connaissance toujours plus claire, toujours plus sûre, pure ; qu’il s’agisse de saisir et les profondeurs de l’infiniment petit et les abysses des régions infinies ; qu’il s’agisse de se représenter le cosmos, ainsi que sa propre « place » en celui-ci ; qu’il s’agisse d’approcher le réel, d’appréhender l’essence des choses et, dès lors, d’embrasser une connaissance de soi autrement complète ; qu’il s’agisse de la question du Hasard, de sa puissance, de cette sorte de reconnaissance du roi, de ces probabilités au cœur de tout atome, ou bien d’un déterminisme inconnu et comme supérieur ; qu’il s’agisse de la lutte incessante entre la science et la religion, de leurs cocasses retrouvailles et de leurs vives séparations, — combien d’autres mystères encore ? — le doute méthodique de Descartes, l’attitude de Pyrrhon, le doute philosophique, en somme cette grande et saine « maladie du doute », anime, renforce, élève les âmes vigoureuses, excitables et aventureuses de tous pays, ces audacieuses navigatrices, nos nouveaux « argonautes de l’esprit », et transforme toute existence en une « fête de l’intellect » constante, en une perpétuelle célébration du « gai savoir ». Remarquons qu’ici, comme pour ce qui concerne le subjonctif résidant au début de la phrase précédente et son logis, cette étrange structure répondant au fier nom de subordonnée complétive conjonctive suivie par la deuxième partie de la phrase, à chaque interrogation humaine, le degré de vérité de l’événement est pour ainsi dire continûment reporté à une date ultérieure. C’est que la Certitude, de même que la Vérité, est une manière de beauté éternelle invariablement fuyante, ce je ne sais quoi qui, de tout temps, a séduit les hommes, et qui, n’en doutons pas, pour peu que ces derniers se donnent les moyens de leur propre survie, continuera de le faire. Devant tout ceci, persévérons donc dans l’étonnement ! dans l’éclatement des fausses opinions, dans l’étonnement de la voûte ! Oh ! j’allais oublier cher lecteur. Si, en faisant mille gambades avec ma pensée il survient que tu te dis, à part toi : ses propos semblaient clairs, puis soudainement ils se sont obscurcis, sache que moi aussi je poursuivais un lièvre sur le sentier, une suite d’images, de sensations qui s’étaient assemblées, une forme fort bien dessinée ; « une vérité, une certitude ! » m’écriais-je ; — mais elle s’enfonça dans le taillis fourré ! Sache qu’en ces moments, je me mets, également, à douter de moi-même… — que nous doutons ensemble !…
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