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Les consciences humaines évoluent dans une sorte d’immense champ magnétique, et elles semblent s’évertuer, d’une manière presque innée, à s’orienter parallèlement à ce champ. La foule est magnétisée.
Le conformisme et la peur, agitant leurs mains démesurées, exerçant leurs influences invisibles, sont les premiers responsables de cette magnétisation.
Toutefois, il est des molécules qui résistent, qui ne se « soumettent » pas… Elles ressentent le péril imminent, cette lame au-dessus de leurs têtes prête à trancher leurs potentialités créatives, à aplanir leurs aspérités, à détruire leurs variétés – à limiter, voire dessécher, leur enthousiasme, leur vitalité, leur aimable folie ; elles décèlent cette voix autoritaire qui voudrait leur faire entendre « raison » et les amener dans une voie déterminée, réglée, « convenable ».
Le champ est particulièrement fort, sa tendance est colossale, mais ces petites âmes, bien qu’elles soient aimantées elles aussi, ne sont pas comme les autres : perdues, complètement désaxées ; elles sont trop malignes et trop intuitives pour se laisser prendre à ce piège : elles devinent que certaines boussoles, telle cette brume épaisse enveloppant les conducteurs, trompent, que certains instruments désorientent – elles démasquent le mensonge, la malignité des conditions et des forces, la nocivité du milieu.
L’individu et la société, l’unicité et le groupe, l’inventivité et la norme, sont ces couples d’acteurs d’un spectacle qui toujours étonne. J’entends cette grande représentation comique et tragique – parfois semblable à un vaste « cirque » – qui, selon le mot d’Erwin Schrödinger, exprime les « vicissitudes de la lutte entre l’agitation thermique et le champ1 »…
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Erwin Schrödinger, Qu’est-ce que la vie ? (Christian Bourgois Éditeur, 1986), 46.
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