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Face à l’invasion de la publicité, du marketing sauvage, des préjugés et des pensées dogmatiques de toutes sortes, face aux lames déferlantes d’informations, à ces « ondes » colossales de données majoritairement insipides et pernicieuses, aux réseaux « sociaux » qui happent : l’indifférence volontaire et distinguée est devenue indispensable.
Car il est des choses si tenaces, que seule cette sublime indifférence, soutenue par une ardeur, une détermination, une volonté encore plus opiniâtre, peut en avoir raison.
On peut se figurer ce complet, ce majestueux détachement comme un champ de force, un bouclier immatériel impénétrable qui préserve des intrusions violentes : une égide « activée » dès qu’il y a péril afin d’éviter et la dispersion de l’énergie psychique et les échanges potentiellement atrophiants avec le milieu extérieur.
D’une certaine manière, il forme cette membrane qui délimite (milieu intérieur et milieu extérieur), protège (en enveloppant physiquement) et régule (en contrôlant ce qui entre et ce qui sort : en réglant les échanges). Il constitue cette enveloppe vitale sélectivement perméable.
Une question émerge, parmi tant d’autres, au sein des flots ; elle s’adresse, avec une légitimité croissante, aux cultures du monde. L’esprit humain, à notre époque des « actualités » massives, des unités d’informations envahissantes et destructrices, possède-t-il une alternative autre que celle d’ériger son propre moyen de protection ?
Ainsi donc, en vue de participer à la « guerre contre la drogue », à la lutte contre la « criminalité », au combat contre les « attentats » infligés à l’éthique, au bon sens, à l’esthétique, aux esprits et à l’esprit, trois éléments sont nécessaires : une conscience consciente du danger, un désir ferme de préserver son attention – ses forces mentales – et une vigilance permanente inscrite dans la physiologie même des barrières régulatrices.
Certains individus parviennent à cet éloignement, à cette hauteur, à cette distance choisie, à ce détachement « élevé », à cette posture si fortement enracinée dans le sol de la raison : ils se tiennent à l’écart de l’incroyable fatras, de l’inaudible vacarme, des vapeurs et des milieux irrespirables, et cela, avec une telle constance, une telle vigueur, une telle audace que toutes ces bagatelles leur sont devenues comme étrangères.
La raison à – et c’est heureux ! – cet effet, chez les âmes rares, au bon goût, de les éloigner des formes les plus méprisables. – Ce que l’éducation, l’entendement, la culture haute rendent possible, par le truchement inestimable de l’indifférence et de ses divers degrés, c’est cette occasion, cette joie, cette chance pour les individus de pouvoir s’offrir un soin peu commun de nos jours : un soin du type de l’oubli, – et un oubli des plus précieux de surcroît ! Un oubli… curatif !
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