1. De l’effondrement.
Le nihilisme total, l’entropie psychique, la dépression profonde, l’effondrement figurent parmi les membres les plus éminents de la grande famille des petites bêtes sympathiques guettant l’esprit de l’homme. En face d’eux, quels sont les acteurs de la résistance, les opposants du régime, les énergies contraires : les freins ; les propriétés, les rôles, les actions structurantes ; les ressorts électriques et chimiques ; les piliers de la cohérence, de l’harmonie ; les voiles du maintien ? — La concentration, l’attention solide, la vigoureuse volonté, le contrôle souverain, la maîtrise de l’énergie mentale. Continûment l’effondrement gravitationnel observe toute étoile de l’intérieur à dessein de la surprendre ; laquelle agit en vue de s’opposer à sa propre gravitation, en vue de sa simple survie ; ainsi, tout individu qui n’y parvient pas, c’est-à-dire qui cède sous son propre poids, pour diverses raisons, entre implacablement dans la dernière course : la destruction complète, la désintégration négative, la destination ultime. Des puits de ténèbres tapissent de leurs ombres les chambres des cerveaux : des pensées négatives, avec des pioches et des pelles énormes, creusant nuit et jour des trous sans fond. Ces entités formidables et monstrueuses avalent et capturent, et ce, sans scrupules, sans la moindre gêne, les joies, les plaisirs, le noble, le grand, — le principe, la lumière vitale.
2. Des maîtres ès arts.
Ce tempérament, ce goût, cet esprit — du sculpteur, du musicien, du poète, du scientifique en pleine possession de leur art — ne s’arrête jamais d’enfanter, sa surface d’écumer, ses cordes de frissonner, sa palette de conter et de chanter, ses pieds de tournoyer, ses ailes de s’ébattre. Lui, l’homme sans nom, le cœur aux multiples visages, l’être indicible ; elle, l’originale, l’indépendante, l’indifférente. Et s’il se trouvait quelqu’un pour demander à ces maîtres de la texture, de la matière, des formes, des métamorphoses, du style, des jardins de l’imaginaire — suspendus, dans le vide à l’intérieur des genres, et flottants, entre les processus conscients et inconscients —, à la créature ce qui la fait continuer à se lever, à marcher, à vrombir, quels sont ces vents soufflant dans ses chaudières, ces courants se déversant dans ses artères, ces moteurs se déchaînant dans son sein, elle ne saurait y répondre… — Mais qu’importe au fond et la question et la réponse ?
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