1. Conservatisme et déviance.
Les idées déviantes sont telles ces substances chimiques peu connues ingérées au cours d’une grave maladie : celles-ci ne constituent pas à elles seules le traitement complet — des molécules ayant prouvé leur efficacité et leur satisfaisante innocuité les accompagnent également ; cependant elles sont parfois indispensables dans la recherche d’effets autrement bénéfiques. Comme l’écrivait Erwin Schrödinger : « Pour développer des méthodes meilleures, il faut risquer des innovations, alors même qu’elles ne sont pas encore contrô- lées ». Exprimé d’une manière différente : « Le conservatisme relatif qui résulte du haut degré de permanence » (pour reprendre les termes du physicien) des informations formant la culture (des mèmes) est primordial — les innovations ne doivent pas être majoritaires, car, dans ce cas, le système est mis en grand péril ; toutefois, qu’il s’agisse de mutations, de remèdes ou d’idées, pour en concevoir de préférables, la prise de risques est indispensable. Dans cette danse où, la règle, la norme, et, le rebelle, la déviance, se meuvent ensemble, la stabilité et la nouveauté possèdent chacune une valeur essentielle. Curieusement, l’évolution fait bien les choses : les humains sont, généralement, en dépit de ce qu’ils disent, indisposés, timorés face au changement ; mais, il existe, quelques uns, qui osent briser les codes, les lois, les mœurs, produisant quelquefois, en fendant les anciennes tables de valeurs et en fabriquant des neuves, des changements significatifs, et valables.
2. Village global.
— Sans cesse, il est question dans tes propos d’idées, de raisonnements, de paradigmes, de culture. — Comment ? T’apprendrais-je que les idées gouvernent le monde ? De plus, lorsque certaines manifestent une toxicité extrême et évidente, est-il démarche plus logique, plus physiologique, plus naturelle que de s’en préoccuper vivement ? La malignité des éléments circulant dans l’esprit des sociétés ne doit-elle pas inquiéter sans arrêt la communauté internationale, nationale, et, d’abord, le citoyen ? À l’heure du « village global1 », même les plus égoïstes ne sauraient-ils songer que, ce qui semblait le plus lointain, dans le passé, n’est plus, maintenant, qu’à un battement de cils, qu’ailleurs est ici et qu’autrui devient soi-même ? L’évolution des conceptions au milieu de cet espace culturel planétaire, et la nature de la transformation de celui-ci, la question de la culture donc, dans son sens le plus fort, n’a, très probablement, jamais été aussi pertinente — cruciale.
3. Sphère.
Suspends au plafond une sphère par un fil. Par le souffle, tu peux modifier, sans qu’il y ait de rupture, les propriétés de son mouvement. — Il en est de même en ce qui concerne ta conscience, ton attention, et tes états d’âmes.
4. Kritikê2.
Tu savoures la tranquillité, allongé dans la douce prairie de ton penser. Soudain, une silhouette s’approche de toi, une incertitude sur la vérité d’une chose, un questionnement sur son existence même. Et voilà tout ton être saisi par l’effroi ; et déjà tu fuis le doute ! Pourtant il devrait être ton meilleur ami ! l’appui le plus sûr au-dessus duquel s’élèverait ton savoir ! Si cela peux te rassurer, sache que tu n’es pas seul : ce qui vient de t’arriver, rien n’est plus ordinaire parmi tes congénères. — Ainsi, voici la règle : il ne faut pas délivrer la majorité des esprits du soupçon, de leurs états d’incertitude, mais les y enfermer ! Il est des constructions au sujet desquelles, c’est le dehors qui constitue un espace borné et l’intérieur qui s’étend à l’infini… — Rechercher obstinément l’absence du sentiment de méfiance, c’est s’inscrire à jamais dans la quête d’une liberté illusoire, c’est enfermer un cercle dans un carré ! Oui, ceci nécessite d’être écrit, et répéter constamment afin que l’on puisse enfin entendre : l’enjeu n’est pas d’apprendre à vivre dans la certitude — pour y parvenir, rien n’est plus aisé : il suffit simplement de fermer les paupières de la critique, et de les maintenir en cet état jusqu’à la fin… ; en outre, que l’on me prouve l’existence d’une seule (certitude) ! —, mais bien, de mieux connaître le doute… de mieux l’évaluer, de mieux l’apprécier, de mieux l’aimer.
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Expression de McLuhan.
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« Art de juger » (Ac. 1992).
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