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Esprit et Liberté

Un espace et un temps pour les esprits libres

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Vincent PAYET

Poésie monstrueuse

Poésie monstrueuse

6 mars 2017 par Vincent PAYET

 

1

Poésie monstrueuse

Peut-être faut-il naître poète
pour aimer les lois
la logique du monde
et le curieux résultat
bien souvent monstrueux

 

Peut-être faut-il naître poète
pour aimer et les bactéries résistantes
et les champignons vénéneux
et les végétaux carnivores et les virus
surtout le plus illustre le grand singe même

 

poète tu l’es sans doute
mais probablement l’ignores-tu toi-même
toi qui depuis tant d’ans
reconnaît toute la farce
et néanmoins la savoure
goutte après goutte
jour après jour
avec un plaisir si épuré
une joie une habilité
un art si consommé

 

2

Innocence débordante

    Si toute la chaîne de conséquences
Demeure invisible en tes yeux,
Et ne doute point un seul instant,
Elle l’est en l’organe raisonnable ;

 

    Si Bien et Mal ne sont que conceptions,
Qu’illusions tout à fait réelles, bien humaines,
Et ne va point croire à quelque sagesse
Énonçant une vérité à cela contraire :

 

    Te reste-t-il d’autre expérience que l’authentique,
Que la salubre, que la vigoureuse existence,
Celle exempte de regrets grouillants —
Le torrent plein et innocent, l’action toujours sémillante ?

 

3

En phase

Esprits négateurs, âmes calomniatrices,
Les mélodies que chante sa langue,
Ne cherchez point à les entendre,
Car si peu sauraient bien comprendre
Ce que prononce une telle inspiration ;
Ignoreriez-vous toujours la vérité que voici :
Que seules les natures de même essence
Peuvent sérieusement tenter de les apercevoir,
Et, qu’il est même heureux qu’un si faible nombre
Forment l’auguste vœu de les dignement concevoir,
Puisqu’en ces oscillations, en son sain mouvement,
Encore plus rares… plus rares encore sont ceux
En mesure de calmement sentir, et de joyeusement boire ?

 

4

Belle ardeur

    Veux-tu contourner l’égarement,
Décèle la belle activité,
Et jette-t’y avec ardeur ;
Celui qui à ce délice sait
S’abandonner entièrement
Tout en évitant soigneusement
Les voies contraires,
N’apportant que troubles,
Malheurs et force misères,
Celui-là pleinement saisira
Le beau fruit de la vie :
Connaîtra les multiples naissances,
Éprouvera l’exquise expérience.

 

5

Sans doute

    En premier lieu, expectorez le verbe !
Par ce mouvement vous apaiserez le doute,
Lequel pour faiblir ne demande qu’à prestement jaillir ;
Puisque c’est dans l’expression, coûte que coûte,
Dans le lâche abandon à la certitude pressante,
Que l’âme servile oppressée s’imagine toute libre,
Que sa pensée allégée se figure tâter la pure vérité.

 

    Qu’à la face des passants soit jetée la doctrine bossuée !
Que la pernicieuse, que la déplorable saute, et fasse mouche !
Il est bon que l’illusion de la certitude stabilise les âmes
Et que celles-ci, rassérénées, s’évertuent pour soutenir leurs consoeurs ;
Ainsi, les lois du monde vous paraîtront plus intelligibles encore !
Ainsi, chimères, maladies, retrouvant leur si antique vigueur,
Se rendront peu à peu toujours plus maîtres de l’esprit.

 

 

Photo © iStockphoto.com / kevinhillillustration 

Classé sous :Journal

System Error

System Error

2 mars 2017 par Vincent PAYET

 

1

System Error

    Erreur Erreur Erreur
À l’intérieur des petites écoles
Au sein des vastes universités
Sur les grandes ondes
Les écrans du monde
Sur les bouches
En les cœurs
Partout tu es logée
Et surtout tu es louée

 

    À travers les âges
De proche en proche
Flambeau grossier
Torche funéraire
Esprit contraire à la lumière
Volontiers les mains te portent
Avec joie on te transmet

 

    Ah parmi le village mondial
Comme ta religion est professée
Virus planétaire
Le plus aimé

 

2

L’âme des philistins

Hélas ! lettres, arts, culture,
Combien il nous est pénible
De vous voir depuis des siècles
Vous débattre avec constance !
Au milieu d’insondables difficultés,
Contre la maladie, la décadence
Contre la misère, l’indifférence,
Dans des eaux souvent si troubles,
À la surface d’un gouffre sans fond… :
Oh ! une manière de sinistre cauchemar !
Parmi les hautes lames tout acérées,
L’âme des purs, celle des vrais philistins.

 

3

Suffisance et insuffisance.

Certes cet artiste était capable d’« états d’âme supérieurs », cependant ses sensations, ses sentiments remarquables, sa personnalité atypique étaient-ils suffisants pour qu’il fût possible de le qualifier « homme supérieur » ? L’esprit honnête, forcé de reconnaître, en face de ce singulier personnage, la vigueur de ses organes, la nature étonnante de ses sens, le caractère particulier de sa complexion, devrait-il à présent s’imaginer envelopper dans son regard l’ensemble des éléments nécessaires à l’élaboration d’un jugement solide et valable, d’un constat manifeste, d’une conclusion souveraine ? La vérité ? Notre peintre ressentait, mais ne concevait point la chose ressentie ; le bras de sa sensibilité était comme laissé seul, en quelque sorte à l’écart de la raison, laquelle constituait chez lui cette forme de puissance éclairante toute tremblante, en définitive, une faculté pour ainsi dire vaguement présente. Parmi ses nombreux motifs, au sein de la vie, il regardait, collectait, parfois même rendait heureusement certaines pensées ; seulement, hélas ! il ne possédait point la distance, les bons angles, la profondeur et l’éloignement — les lois, l’art de la perspective convenable et prometteuse. Jamais, en sa carrière, jamais, en l’existence, ses doigts n’avaient pu acquérir l’essentielle dimension, l’acuité, la perspicacité, en somme, la vision et l’attitude indispensables aux réalisations éternellement estimées et foncièrement durables ; jamais il ne sut toucher la possibilité de donner le jour aux seules choses qui demeurent, qui souvent même prennent de l’ampleur : aux créations impérissables, aux œuvres d’exception.

 

4

Le temps qui court

    Pour lire le temps manquait à l’homme ;
Alors la Plume écrivit pour lui de brefs essais.

 

    Mais le temps s’échappait ;
Aussi composa-t-elle des aphorismes.

 

    Toujours les heures s’évanouissaient,
De brefs poèmes virent le jour.

 

    Et comme le temps fut encore trop court,
Quelques lettres en toute hâte furent animées.

 

    Mais sans faiblir, en la parfaite continuité,
« Que le temps semble fuir ! » qu’il disait.

 

5

L’essence de l’être

L’énergie n’est pas seulement l’aliment de l’être, elle est l’être. Car ôtez-la lui : le corps, l’esprit, l’ensemble indivisible ne reste pas immobile et assoiffé, telle une machine privée de sa boisson favorite ; mais bien plutôt commence à réclamer sa subsistance, puis, faute de réponse appropriée, c’est-à-dire de soutien, d’essence, de matières, par manque de substance, s’affaiblit, se désespère, et se disperse peu à peu…

 

6

Douce nuit
Et dans le lointain
Le murmure d’un oiselet

 

7

Jeunes plantes
Arbres majestueux
Quelle haute tranquillité
Quelle paix aux coeurs offerte

 

8

Amies silencieuses

    Variété merveilleuse,
Amies silencieuses,
Aux mille couleurs,
Aux multiples senteurs,
Êtres si nécessaires
Et tant négligés,
Dans l’obscurité,
Combien vous soutenez
Vos hôtes,
Combien vous irriguez
Les hommes —
Comme vous portez
La vie !

 

 

Photo © iStockphoto.com / Romanovskyy 

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Nature ultime

Nature ultime

27 février 2017 par Vincent PAYET

 

1

Nature ultime

Considérant les choses, tu te figures atteindre parfaitement leur vraie, leur ultime nature. Mais, par combien de labyrinthes tout à fait extravagants les as-tu fait passer ? Au travers de combien de bizarreries complètement personnelles, d’irrégularités internes, de défauts fort intimes ont-elles dû évoluer ? Amenées à ta conscience par les canaux souillés, les déformations, par les transformations nombreuses et variées, forcées de naviguer sur les voies les plus étranges, les plus humaines, condamnées à se mêler à tant de défauts inhérents à ta propre nature, tu t’imagines encore leurs « corps » libres de toute impureté causée par les différents matériaux et les divers passages ? comme toujours bruts, comme entièrement vierges d’innombrables intentions conscientes et inconscientes dont seul ton esprit si imparfait, si tordu est si capable ?

 

2

Des corpus

Il faudrait assembler les importants corpus qui s’attachent à creuser la question de la « belle âme ». Et se rendre compte de la place centrale occupée par certains éléments tels que la maîtrise du développement individuel, la recherche constante de l’élévation et le goût pour le progrès véritable  : en somme, la connaissance du monde aussi bien que la connaissance de soi, l’excellence sise à la pointe d’un processus volontaire qui est à la fois l’objet, la voie et le dessein.

 

3

Duo majestueux

La cavalière se nomme Verbe,
Le cavalier Conscience ;
Celui-là a éprouvé la sublime danse,
Qui célèbre le sens et le son.

 

4

Présente récompense

    L’heure de la juste récompense…
Elle importe si peu !

 

    Cueille les petits fruits de tes labeurs,
Dans la main des lieux,
Parmi l’instant,
En la joie et la peine,
En la sueur ardente
Et la mer glacée !

 

    À l’intérieur de la belle activité
Tantôt ardue, tantôt aisée,
Au cœur de l’intime feu,
Telle la plus belle des flammes,
En pleine joie,
Lentement consumes-toi !

 

   Oui, chante, vrille, et chancelle.
Apprends à briller, à vivre —
Dans l’ivresse des jours à brûler.

 

 

Photo © iStockphoto.com / skalapendra 

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Topologie des contraires

Topologie des contraires

24 février 2017 par Vincent PAYET

 

1

Topologie des contraires

« Afin que tu puisses entrevoir
La vrai nature des contraires,
Prononça la voix éthérée,
Représente-toi deux créatures ailées.
Après une âpre, une colossale lutte,
Une dispute presque éternelle,
En se tournant le dos celles-ci se promettent
Une séparation des plus parfaites ;
Chacune, aveuglément, va foncer droit devant elle,
Persévérer dans son exacte trajectoire,
Poursuivre l’effort, poursuivre l’erreur ;
Est traversée la superbe variété des époques,
Sont fendus des siècles et des siècles ;
Quand soudain, quelle commune surprise !
Dans l’instant, révélée, quelle méprise !
Voilà, se découpant graduellement sur les lointains,
La figure de l’ancienne ennemie tant redoutée ! —
Les deux amies ignoraient que les degrés de la vérité,
Que les innumérables nuances de ce monde
Ne suivent pas une distribution toute droite :
Que leur mystérieuse ordonnance appartient,
Épouse, et ce dès l’origine, une essence différente,
Une géométrie autre — une géométrie courbe. »

 

2

Sphère victorieuse

    Nulle distance ne t’effraie,
Nulle durée ne t’éloigne,
Par la pure aspiration
Tu te laisses entrainer.

 

    Et qu’importe l’impression faite,
Les tourbillons d’importuns,
Les spectateurs, les badauds,
L’attroupement bien malade ?

 

    Qu’importe les langues décadentes,
Les célèbres bifides frétillantes,
La bête, la gueule,
La vipère et ses pointes ?

 

    Tu ne demeures plus enchaîné
À tes propres ténèbres ;
Une intime vigueur te soulève —
Vers une plus furieuse destinée.

 

    Te voilà enfin, parmi le sombre,
Le tumulte, l’incertain,
Qui t’éveilles au monde… :
Ô naissance heureuse !
Astre infime, sphère victorieuse !

 

3

Illuminée ou sombre

    Sens-tu, âme du monde,
Volonté cahotée,
Esprit si voyageur,
Cette énergie mentale ?
Illuminée ou sombre,
L’impérieuse puissance,
Son invisible champ ?
Ô la Main ! ô la Force !
Le Ressort souverain !
Des personnalités
Gouvernant le dessein ?
Parmi certaines lignes,
Se déchire la masse,
Fort bien déstructurée,
Puis tout à fait vidée.
Et quelle prétention !
En celles se figurant
Voir leur proche avenir,
Celles s’imaginant
Posséder en tout point
De l’espace psychique
De leur propre futur
La très haute maîtrise !

 

 

Photo © iStockphoto.com / chuntise 

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Les dépossédés

Les dépossédés

22 février 2017 par Vincent PAYET

 

1

Les dépossédés

Dans les maisons, les mains déploient leur activité en vue d’accumuler biens sur biens, à l’intérieur d’un acharnement, d’une constance rare. Mais ne voient-elles pas que, ce faisant, elles se privent de la possession de quelque chose d’autre ? que la liberté elle-même est insensiblement traînée vers le cruel paillasson ? Mêlées à une vision aussi étonnante qu’effroyable, parmi une sorte de passion fort furieuse, les Richesses aspirent à s’accoupler, sans faiblir et sans fin, et cependant, dans l’intimité des êtres, les plus profondes valeurs répandent leurs cris assourdis : leur affreuse pauvreté, leur atrophie, leur anéantissement — leur profonde misère de dépossédées. Face à l’uniformisation, à la propagation culturelles, face à la crise globale des valeurs, comme les consciences exprimant leurs inclinations individuelles et leurs propres voies font défaut ! Combien s’est installée à l’intérieur des sociétés une hiérarchie des principes morbide, irrespectueuse envers le soi, l’environnement et l’autrui ! une manière de vivre et de concevoir ce vivre étrangère au bon sens et aux nobles sentiments ! Combien les transformations internes, intimes, à une époque pourtant prodigieusement effervescente, au sein d’âmes tout à fait soumises aux influences extérieures aveugles, appartiennent à l’inhabituel et, surtout, sont si peu décisives ! Que le superficiel enfin, parmi le domaine de la culture, qui est de tous celui qui forme au plus haut degré le sentiment et la raison, gagne du terrain, telle une herbe des plus vivaces et des plus pernicieuses, tel un torrent de maux impétueux, une diabolique volonté impérialiste ! Incontestablement, la « pauvreté » marche à grand pas, à pas feutrés : les personnalités, les esprits, les âmes « riches », semblables aux bonnes graines au cœur de l’ivraie, sont pour ainsi dire hésitantes à naître, à germer, à se montrer. Par ailleurs, en les observant de très près et bien soigneusement, l’on croirait apercevoir des manières de frêles esquifs, ballottés et presque flasques ; des consciences se débattant des pieds et des mains, comme des possédées, au milieu des désordres et des peines sans nombre de leurs sœurs insouciantes… — si insouciantes.

 

2

Rendre l’infini

Dans le vague, ses regards
Cherchaient les points très espacés,
Les fort curieuses ondes,
Les prodigieuses lignes de fuite ;
Son bras, ses doigts, l’esprit,
Tout près, dans le lointain,
Sans relâche était à la quête
Des possibilités dissimulées,
Des nuances toutes variées,
Des formes indéfinies :
Sa peinture louait le réel,
Son imagination goûtait l’infini…

 

3

Intelligence bornée

Ah ! quels angles innombrables !
Quelle habitation remarquable !
L’étonnante, la complexe,
La superbe et puissante figure !
Singulier polygone inscrit dans le cercle,
À l’intérieur des lois de la nature,
Front altier, vaste intelligence
Développant sa très longue nappe,
Multipliant ses bien précieux plis !
Une volonté si déliée, presque illimitée !
Et cependant une âme si en mesure,
Dans sa recherche de la perfection,
Dans son voyage vers la réalité,
Sur les sentiers des choses vraies,
De se maîtriser et d’épouser les sinuosités des bornes ;
Si en mesure, enveloppée de liens d’airain,
D’éprouver, de continuellement embrasser,
Animée par une vigueur toujours fraîche,

La noble activité et la charmante gaîté.

 

 

Photo © iStockphoto.com / Route55 

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Haute et commune culture

Haute et commune culture

20 février 2017 par Vincent PAYET

1

Haute et commune culture

Vous qui vous efforcez chaque jour à gratter les choses, à creuser dans les ruines, le roc, sous terre, dans les profondeurs, à soulever davantage ce coin de l’immense voile du réel, vous vous imaginez pouvoir retenir longtemps la radieuse espérance de voir grandir promptement le nombre de consciences gambadant autour d’une communauté de vues lumineuse, changeante, resplendissante ? Le phénomène est d’une certaine importance ; aussi, ayant pour votre personne une certaine sympathie, et considérant que cette affaire n’admet point de retard, souffrez qu’en compagnon de route je vous glisse dans l’oreille ceci. Au sein d’une aversion aussi profonde qu’ordinaire pour les métamorphoses, de particularismes qui n’aspirent ça et là sur le globe qu’à s’épanouir encore et encore, au milieu d’une pensée dominante assoiffée de baumes et de mirages, une posture commune à l’intérieur d’une conception qui n’accepterait de se nourrir et de se délecter que de ce qui peu à peu se rapproche du vrai se fera, parmi cet esprit moderne, cette entité mondiale hantant par trop souvent notre temps, formidablement attendre… Oui, eu égard au point où en sont les choses, la durée ne saurait être que… cruellement considérable.

 

2

Obsession de la maîtrise

Nappes de brouillard, tourbillons de poussière : comme les phénomènes, comme toutes les choses t’enveloppent et t’emportent ! Et avec quelle rigueur, avec quelle fureur tu t’évertues pour te conduire en gardien des secrets de la Terre et du monde ! Avec quelle impression d’étrangeté, avec quel étonnement l’oeil se pose sur un bipède doué, entend-on couramment répéter, de raison, mais agissant cependant telle la plus déraisonnable des créatures ! Oh ! quel désir de domination, de pouvoir, de puissance contenu dans un si modeste crâne ! Seulement, constate donc ! Tout ! tout passe et te dépasse ! Pourtant, au sein de ton obsession de la maîtrise, si vaste est ta persévérance, tant considérable ton transport, colossale la mystification ! — À un degré pour ainsi dire inimaginable, indicible.

 

 

Photo © iStockphoto.com / thedafkish

 

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Littérature et Art

Littérature et Art

17 février 2017 par Vincent PAYET

 

1

Littérature et Art

Ah ! ton âme s’assèche,
Éprouve l’ardeur terrifiante des vents,
Se trouve comme condamnée
Au brûlant, à l’éternel désert ?
Plonge-toi dans les eaux fraîches :
Bois à l’onde saine et revigorante !
Dans l’étendue de la littérature et de l’art,
Parmi les œuvres exquises de la Nature,
Au sein des productions humaines d’exception,
Loin du vil, du laid, du barbare,
Cherches-y le labeur, la valeur, ta récréation,
Décèles-y ta lampe, ton pain, ton bonheur !

 

2

Authentique figure

    Mais le choix, tu ne le possèdes pas !
Puisque ce n’est qu’en la vie même
Qu’il t’est permis de puiser ta matière,
Ton art, la nature de ton sort.

 

    Goûte donc de nouveau aux choses,
Graduellement, embrasse encore le monde,
Sereinement, connais-toi toi-même !

 

    Afin de t’élever au degré de tes possibilités,
D’évoluer toujours à ta propre et pleine hauteur —
En vue d’être en mesure d’étreindre ce pour quoi tu es fait !

 

    Armé d’un bras sûr et robuste, d’une main qui sait,
Dessine-toi une ligne, une course, un visage :
Montre-toi les traits authentiques,
La figure véritable, celle de ton âme.

 

3

3-sphère

Tu te figures rejoindre graduellement l’infini,
Mais, ami, quelle que soit la durée de ton voyage,
Et quelque direction que ton esprit suive,
Les mêmes vérités de départ sont sans cesse traversées.
C’est que même parmi le bien vaste champ des idées
La pensée progresse continûment et sans s’en apercevoir
À l’intérieur d’un étrange système : une très curieuse sphère.
T’enveloppant mystérieusement, songeras-tu à présent
À ce drôle d’objet ? — à cet espace fini et sans bord ?

 

4

Sagesse la plus haute

    Qu’il s’en aille loin,
Refus, Pessimisme,
Volonté de nier,
Abattement !

 

    Qu’il arrive prestement,
Acceptation, Gaîté,
Affirmation,
Engouement !

 

    Le sage n’aspire, et sans cesse,
Qu’aux mêmes conditions initiales,
Qu’aux mêmes évolutions,
Qu’aux mêmes actions et réactions :

 

    Le bon et le mauvais,
Le sémillant et le morose,
La chose identique toujours et encore —
Les mêmes voies du dénouement.

 

5

L’humain bien élevé

Le noeud de l’éducation parentale,
Et de toute l’éducation d’ailleurs,
En une seule question s’assemble ;
Et si celle-ci dans l’histoire de la pensée
N’est assurément pas une nouvelle-née,
Elle mérite d’être continuellement évoquée :
Quelle sorte d’homme doit être nommé,
Voulue, enfantée et patiemment formée
Qui porterait en soi une valeur autrement élevée ?

 

6

Sinistres présages

    Tristes tropiques,
Lancinants soupirs de la Nature… :
Perçoit-on le cœur oppressé ?
Parmi les déserts, les forêts,
Au cœur des rivières et des prés,
Un vent funeste brûle de se lever… :
Ressent-on la poitrine angoissée ?
Et que dire sur les multiples naissances,
Les pressantes approches, les alarmes,
En l’horizon, les ombres des futurs proches ?
La rumeur des mers, des rocs,
L’étrange visage, les sinistres présages,
La houle, tout semble n’aspirer qu’à s’enfler. —
Quelle scène formidable ! Quel moment décisif ! —
Les grondements de l’orage balbutient encore,
Un calme trompeur égare l’âme qui dort.
Toutefois, d’aucuns ne s’y trompent point ;
Au loin, tout à côté, le cruel vacarme s’apprête,
Tandis que dans les songes la petite se baigne.

 

7

Modelage salutaire

    Un jour, ne saisissant plus grand-chose
De ce qui se passait et tourbillonnait
Au-dehors aussi bien qu’au-dedans,
Il se résolu à s’arrêter en lui-même un moment.

 

    Saisissant la glaise dans l’urgence,
Il commença à modeler ses discrètes sensations,
Ses insensibles affects, ses muettes considérations ;
Lorsqu’il s’arrêta derechef : ses mains abritaient le soi.

 

    Peu à peu les tourments en tous lieux s’évanouirent,
Le calme, la plénitude dans le nouveau logis s’installèrent ;
Et quoique les spirales du monde continuassent de mugir,

En son sein régnait affermie une amène atmosphère.

 

 

Photo © iStockphoto.com / Aluna1 

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