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Esprit et Liberté

Un espace et un temps pour les esprits libres

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Archives pour septembre 2016

Ad patres

Ad patres

30 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

Bien curieux personnage que cet homme moderne remplissant ses grandes cités industrielles. Multipliant les heures de travail, subissant toujours davantage les effets sournois du stress, le grand nombre dévore, sans le savoir, les minutes accordées par la destinée, et se retrouve, à la tombée cendreuse du soir, dans un état d’épuisement, dans une telle lassitude de l’âme que les secondes restantes sont négligées, méprisées — expédiées… ad patres. Ô existence humaine ! — À l’entrée d’un village à l’écart est une source merveilleuse. Lorsque le visiteur curieux s’en approche, il perçoit, quelquefois, de singuliers jaillissements, de fort étranges paroles, les perpétuelles vérités. S’abandonnant au rythme pur, au limpide son du griffon, et non sans une vague, une vaine, une certaine appréhension, il recueille les eaux célestes : « Si demain tu songes à un monde sans les excès, les gaspillages, cette vaste méprise pour ce qui est des choses sans prix, que tu te représentes des âmes regardant clairement en elles-mêmes, des consciences ayant la vision bien moins troublée, et que tu sens les souffrances innombrables se noyer alors dans l’étendue des profondes satisfactions, et que, en ton esprit, l’image de créatures ainsi lavées de leurs pensées souillées se forme, l’image de consciences dans une gaieté insoupçonnée se laissant aller à la fontaine des douces et joyeuses félicités… que… — comme tu baigneras dans une histoire délicieuse, une mer de délices infinie pour les sens et l’esprit, comme ce monde-ci, plutôt que ce monde-là, plaira à ton cœur, et comme celui-là s’opposera, dans la suite, à ce que tu retournes en ce dernier !… » — Et le voilà, l’esprit purifié, après maintes et maintes visites, moult écoutes, qui recouvre la vue et sourd avec force : « Oh ! en aucun temps elle a goûté un liquide désaltérant, une substance supérieure, une nourriture substantielle, après des épreuves harassantes, celle qui n’a pas éprouver tout ceci comme je l’éprouve ! »…

 

Photo © iStockphoto.com / tonivaver

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Les promesses

Les promesses

29 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

Ah ! comme il faudrait que des promesses soient faites, et tenues : cesser de subir au milieu de l’humide résignation, les circonstances amères que la fortune répand en pluies torrentielles sur les terres ; hausser les sourcils, les épaules, mais ensuite, hausser la tête ; transmuer les vues, les habitudes, et évaser sereinement la bouche en savourant dans la joie la céleste fontaine !… Quand les lamentations d’autrui cognent à nos oreilles, que la plus lourde des tristesses, comme saisie de folie, nous assiège, et que nous ne pouvons compter que sur nos propres boucliers internes, notre propre résistance, notre vaillant égoïsme, notre précieuse indifférence ; que, où que nous portions nos souliers, notre regard s’arrête sur tant de créatures abattues parmi la poussière ; que les plaintes inaudibles des cimes du désespoir s’élèvent en tout point sur notre chemin, à l’intérieur des campagnes ou des villes, au sein des maisons ou des déserts ; compagnon, quand nous éprouvons ces larmes étouffées et ces visages enflés, et que nous souffrons du creusement sans fin — au milieu de si jeunes fronts ! pourtant construits pour goûter l’éternelle jeunesse ! — de ces rides étalées, alors il nous souvient de cette ancienne histoire de promesse, et nous nous disons, et nous nous confions dans l’intimité, en pleine sincérité : « Ah ! Si tu étais en mesure de partager toutes tes précieuses émotions, tous tes sentiments élevés ! si tu te sentais la force de communiquer aux hommes ton amour pour cette vie et ta sincère espérance placée en leurs coeurs, de sorte que tes écrits, tes paroles, en somme, tout ce qui réside en toi de plus nobles, en se muant en surface de ton état de conscience le plus pur, se métamorphose en bras et en baisers inaltérables, telle la surface des aimables mers, des bois rieurs, des montagnes altières, des rêveuses rivières, telle la nature elle-même et son corps chaud, doux et enveloppant d’affection et de tendresse !… » Camarade… Mais nous percevons que le fardeau est trop massif, la tâche titanique, que nous ne parviendrons, finalement, par faiblesse, qu’à ne rendre que faiblement la misère, les plaisirs, les espoirs, les matériaux, l’incompréhension… l’absurdité ainsi que la jouissance dans la condition humaine ; nous percevons que l’impression est par trop forte, que sa densité, sa pression aveugle et trouble nos sens et notre raison, que notre air, notre pont et l’ensemble de notre édifice sont ébranlés, que la voie, l’accès du nous et du vous se fait escarpé. Mais nous voulons, nous devons, nous ne saurions, par nature, faire autrement que de continuer, — du mieux que puissions, — de peindre devant les êtres et nous-même leur âme, et ainsi la nôtre ; — et ce faisant : nous languissons, nous nous redressons ; nous nous effondrons, nous nous révoltons ; nous nous désintégrons, nous nous transfigurons presque ; nous devenons toi, lui, vous… nous atteignons qui nous sommes : un pauvre et bien chanceux mortel, une créature fort sensible, révoltée, très artiste… un ami, un censeur et de ces êtres tantôt magnifiques, tantôt immondes et de ce monde tantôt impitoyable, tantôt majestueux — en tout temps vénérable.

 

Photo © iStockphoto.com / Maria_Galybina

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Festina lente

Festina lente

28 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

1. Festina lente.

Voit-on toutes ces mains hâtives, superficielles, exécutant un tableau sur leur vie ? se représente-t-on toutes ces compositions, toutes ces figures mal traitées ? sent-on enfin tout ce travail, toutes ces œuvres vite expédiées s’enfonçant dans l’ignorance, dans médiocrité, dans la vacuité, jusqu’au cou  ? On ne se hâte point trop dans ses jugements lorsque l’on peint des hommes ordinaires manquant cruellement d’application, de coeur à l’ouvrage, et par une conséquence naturelle de pleines et véritables satisfactions. Car cette créature commune, plutôt que de tâcher à dessiner et éprouver une existence haute, riche, intense, plutôt que de se résoudre en pleine gaieté à tracer des épures, des plans, et des chemins d’expériences heureuses, formés dans la valeur, plutôt que de se laisser aller aux lignes les plus pures, aime mieux s’abandonner à des buts méprisables, à des philosophies indicibles, à des voies autres, à la décadence même. Des champs, semble-t-il, habitent les consciences, et, de même qu’il existe une sorte d’invisible tendance des corps vers la partie centrale de la Terre, de même les esprits subissent la colossale attraction des bras, des masses, des gorges de la passivité, de la superficialité, de l’indifférencié. Mais avec de pareils actes, de semblables attitudes, d’aussi basses et laides conceptions, nulle œuvre d’exception n’est en mesure d’être enfantée.

 

2. Jeunesse-confit.

Ah ! toutes ces pauvres bêtes, et tant d’yeux satisfaits. Ces jeunes âmes éduquées pour être gavées, gavées pour succomber — être transformées en confits et en pâtés. Et toutes ces bouches formées afin d’en humer les funestes odeurs, d’en goûter les terribles saveurs… Oh ! Jeunesse pieds et poings liés sur nos sociétés ! Jeunesse sur nos contrées dévastées, sur ces vastes planches… à débiter ! Jeunesse à peine née, finement hachée — entre quatre planches. Ô misère inouïe ! ô vue insoutenable  ! Ô dieux !… — Que nous tremblons, quand nous apercevons en ces jeunes cœurs la malheureuse lueur, l’absence de tremblements, la confiance qui écoeure ! Que la terreur nous envahit, quand nous sentons le serpent dérouler ses anneaux et enfler sa gorge sur les dalles d’un futur arrivant au galop ! Et que l’Humanité devrait se ressaisir avant que d’être saisie par la dalle funéraire !… — Las ! — qui en croirait nos sens et notre bon sens ? — la voilà qui attend : patiente par bêtise, et surtout, par sottise, érigée, dressée par habitude et grotesque vanité.

 

Photo © iStockphoto.com / Marija_piliponyte

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Intégration

Intégration

27 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

1. Intégration.

Les messages arrivent de tous côtés. Le général les considère, se charge de leur traitement ; coordonne les oscillations, les activités, les flux ; les sensations naissent ; les organes répondent au chef d’orchestre, à ses heureux commandements… : la prodigieuse intégration est. Corps, émotions, sentiments ; passé, présent, futur ; conscience de soi… : au sein de l’être, l’unité mystérieuse jaillit de la variété ; au milieu de cette matière et de ces formes, en pleine indétermination, au cœur de l’écume, celui-ci s’assemble, se forme et se reconnaît. La belle conscience ne néglige point les intimes données, ses plus valables affaires, car elle sait la valeur des humeurs, des murmures, des rumeurs ; elle ne le conçoit que trop, leur validité et leur inestimable intérêt. Ainsi, que certains puissent être dans cet état où les nobles matériaux au plus au point leur sont indifférents génère devant leurs yeux un vaste mystère.

 

2. L’expansion de la plume.

L’important n’est pas de savoir si tel auteur à la stature de Goethe ou de Valery, ou, même, si, suivant Mauriac, « il existe en tant que “planète”, s’il constitue un monde clos », mais s’il réunit en soi les conditions nécessaires, les lois physiques fondamentales, s’il abrite suffisamment de chaos, de puissance, de soif de lieux et de durées : si son moteur se nourrissant d’explosions, après avoir été en mesure de mettre au monde un univers, est capable, sans discontinuer, d’enfler la poitrine de ce dernier… La vraie question est donc de savoir, quels que soient la taille actuelle de l’écrivain et les espoirs qui courent à son sujet, s’il porte en soi les choses et les formes qui adviennent, le souffle créateur — ces germes de l’expansion.

 

3. Tourne, tourne, tourne…

En maintenant son attention dirigée et concentrée sur un objet particulier, celui-ci se précise, s’affine, se détermine ; dans un espace mental devenu le sien et qui ne finit point de se creuser, il prend forme. Les affects et les conceptions d’ici et d’ailleurs, c’est-à-dire ces matières, ces énergies psychiques jadis éparpillées, bientôt empruntent les nouvelles voies de la région déformée. Tandis que ce fond et cette forme s’accouplent et tourbillonnent élégamment, la dispersion de la pensée, qui auparavant hurlait comme une forcenée, s’amenuise, épuisée. Le flux psychique, canalisé, sûr de sa force, se dresse au-dessus de lui-même, pareil à une chaîne de montagne à l’horizon, puis semble se replier, avant le grand plongeon, avant que de se jeter complètement dans la « dépression », à l’intérieur de l’objet, de la structure nouvellement constituée. La diversité des aspects dont se revêt cette destination est des plus étonnantes ; les tourbillons au sein desquels les âmes aiment de se déverser grandissent dans une différence innombrable : tel homme plonge dans la drogue ; tel autre est avalé par les dogmes ; d’aucuns vont se baigner dans le lac des arts ; un autre groupe jouit de la science… La terre, les têtes, les passions toujours tournent, tournent, tournent… — Certes, toutes les rotations ne se valent point, cela est l’évidence même, il en est des bien plus heureuses que d’autres. Mais qu’importe ? puisque, de tout ceci combien se soucient ?

 

Photo © iStockphoto.com / Inok

 

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L’âme supérieure

L’âme supérieure

26 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

L’oeil du fin connaisseur en œuvres d’art se pose sur l’homme excellent, l’âme supérieure. Chaque jour, celui-ci lutte, s’exerce, tel le virtuose dans les nombreuses heures, se développe à l’intérieur de sa tâche ; il rassemble ses modèles, ne considère que la perfection dans les différentes matières, que les personnalités exceptionnelles qui forment les genres et les embellissent ; il a le regard difficile, un organe qui ne veut s’arrêter que sur le rare, l’exigeant, le chef-d’oeuvre. Cet ange musicien, cet illustre compositeur de l’existence sait que c’est l’art qui l’éloigne de l’animal ; animal, il l’est bel et bien ; mais il désire appartenir à la race de ceux qui fuient l’insignifiance, de ceux qui, percevant à un degré éminent leur condition, n’en acceptent que certaines formes : les plus hautes sur l’échelle de l’originalité, les plus raffinées, en somme, les configurations autrement belles… les géométries les plus élégantes. Tout bien considéré, cet artiste, lui aussi, ne fait ni plus ni moins qu’observer sa propre nature ; toutefois, lui, la rehausse dans la suite, lui, mène après cela une vie tout à fait conforme à cet inestimable embellissement, à cette altitude élevée — lui seul devient cet aviateur improbable ne cessant de voir les choses de plus haut. Et l’esprit ailé est étonnant : il ne désire point survoler un verger qu’il ne possède, il n’envie point son voisin, son prochain, et, quant à son domaine, en horticulteur d’une autre espèce, son corps humain ne tolère que la plus noble des terres, les plus beaux arbres, les fruits les plus heureux… En effet, tout ceci ne se produit que pour la simple raison qu’il possède une vision claire, inoubliable et de ce qu’il est et de ce qu’il est en mesure d’être : certes, comme tant d’autres, les semences et les promesses sont enfouies sous des couches de résistances, au fond de son être, et certes, s’il ne sentait point leur présence ni leur importance, il ne saurait les concevoir ; mais… — comme il en a l’intuition ! comme, telle une femme prête à enfanter, il a conscience de leurs élans, de leurs mouvements à venir, de leurs puissantes et sublimes aspirations en devenir !…

 

Photo © iStockphoto.com / thedafkish

 

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Écologie de l’écriture

Écologie de l’écriture

25 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

Peut-être, devrions-nous juger un auteur davantage sur ce qu’il néglige plutôt que sur ce qu’il précise. Car il n’est rien de si naturel que d’envahir le papier, que de libérer dans ses champs les chevaux enfermés, que d’élargir les prisonniers. Ô lignes innombrables ! que vous êtes accueillantes, charmantes, dociles ! Combien vous souffrez, tout indifférentes à ce qui se passe, que l’on déverse en votre sein ces encres rougeâtres, verdâtres, noirâtres — que l’on me pardonne la faiblesse du développement : l’espace de temps n’est point propice à une causerie autour de l’âtre et de son caractère péjoratif —, ces liquides méprisables, malodorants, impurs, — ces déjections et déchets de tout ordre ! À peine quelques instants sont nécessaires pour que, armé d’une analyse quelque peu ordonnée, l’on s’aperçoive que le mythe de la beauté facile n’est jamais très éloigné de la conception ordinaire ; et pourtant le Mérite de l’artiste n’est que cette créature logeant essentiellement chez les refus volontaires, les limites arbitraires, en ces satisfactions prêtes à être consommées qui, par respect pour le lecteur, pour soi et pour l’art, sont avec moult force réfrénées, maîtrisée, annihilées. Oui, celle-ci réside bien souvent dans la destruction, la prévention, l’absence de naissance. Qu’il n’y ait point de doute sur mon propos ; je n’évoque ici, ni plus ni moins, que cette manière de concevoir fuyant la superficialité, la célérité, l’encombrement ; qu’une fabrication raffinée, économique, « responsable » ; qu’un atelier et un produit — une invention — rares, inclassables, à l’écart ; qu’une valeur fondée sur le processus même de sélection : — une écriture « écologique », comme il en existait abondamment naguère, imposant les prudences les plus grandes, la minutie la plus délicate, les exigences les plus hautes, et, réclamant de ses hôtes d’immenses efforts, c’est-à-dire un intense travail dans l’acte même de réception… Des mots qui seraient donc des dons ne se laissant point attraper au moyen de cette facilité tant surestimée… Des présents qui seraient dignes d’être donnés et qu’il faudrait être dignes de goûter… En définitive, une production, une distribution et une consommation, une écologie salvatrice à redécouvrir et à bâtir : des entités dont les intentions foncièrement louables n’ignoreraient point la présence de la valeur gravée au sein même de la notion de durée — des considérations et des activités profondément autres, considérablement inactuelles.

 

Photo © iStockphoto / Daria_Andrianova

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Unus et vertere

Unus et vertere

24 septembre 2016 par Vincent PAYET

 

1

Unus et vertere

 

Et, comme surgissant de nulle part, l’Univers se leva,

S’érigeant tel un homme d’un seul coup d’un seul,

Sur son unité et sa multiplicité,

En sa naissance et ses métamorphoses ;

Le mouvement engendra le mouvement ;

Dans le flanc du géant, l’Évolution-mère

Se mit à abriter de formidables embryons :

Évolution des structures,

Évolution des espèces,

Évolution cérébrale,

Évolution de la conscience,

Évolution de l’espace,

Évolution cosmique ;

Elle, la Nature,

Emmenait sa progéniture dynamique vers l’avenir.

En vérité, le futur, déjà elle le contenait ;

Et il lui suffit d’attendre patiemment

Que celle-ci eût voulu d’elle-même connaître le jour…

Pour l’enfanter.

 

 

2

Géométrie des états de conscience

 

Communique-moi seulement les propriétés de la matière-énergie

Que tu laisses courir sur la nappe de ton esprit

Ainsi que sa densité et sa répartition,

Et je t’instruirai dans ta forme,

Te dessinerai un mouton, un boa…,

Puis une vaste partie de ta carte mentale ;

En y ajoutant l’abondante variété

D’idées, d’images,

Des mets de ta conscience,

Devant toi te dévoilerai tout ce que tu penses, —

Dans un murmure soufflerai sur ton visage ce que tu es.

 

Photo © iStockphoto.com / arda savaşcıoğulları

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