1
L’excellence. — Ce qu’il voit dans son voisinage immédiat et en lui trempe depuis trop longtemps, dans une conspiration, dans un crime : dans la dolence. Il souffre, avale les frustrations, et non pas l’une après l’autre, mais d’un coup. Son regard caresse les sublimes lointains, lesquels, aujourd’hui, se refusent à tout ce que leur demandent ses mains : au loin, sur la rive étrangère, attendant en silence, presque inaccessible, demeurent les promesses, le remède… l’excellence.
2
Abattoirs. — Si vous me laissiez vous parler, je pourrais m’adresser à votre cœur. Mais, vous l’avez isolé, et le volet de fer est baissé. Certes je saurais bien exprimer ma colère, ma détresse, ma misère, cependant à quoi au juste cela pourrait servir ? — En l’effroyable indifférence, en le silence assassin, tout s’écoule et se désespère… tout coule… se perd.
3
Enjeu céleste. — Il n’est pas nécessaire qu’il y ait davantage qu’une seule langue lourde et maussade gravitant autour d’une étoile pour que non seulement celle-ci s’assombrisse, mais même l’ensemble du système solaire : les papillons noirs dans l’éther se propagent tel l’éclair. Et celui-ci, depuis toujours, habite la plupart des espaces. Cela explique que, les ondes étant devenues excessivement néfastes, insupportables, certains corps lumineux par eux-mêmes, s’indignent, chacun de son côté, contre leur sombre planète et éjectent l’importune. — Dans cette affaire il n’y allait pas moins que de leur belle humeur, de leur nature, de leur existence. — C’était leur santé, et donc également celle des autres qu’ils éclairent, qui était ici en jeu.
4
Suprême hyménée. — Celui qui déclare que les mots lui manquent pour l’expression juste de sa pensée, très souvent méconnaît l’inouï dans la richesse et la profondeur de sa propre langue. Quant à l’autre, la possédant, ce qui lui fait habituellement défaut, c’est l’ampleur, l’intensité, le trésor infini : la palette riche, brillante, inépuisable des sensations, des émotions, des sentiments et de l’imagination. — Seul le véritable artiste est doté des deux, du moins est-il le seul assez fou pour tenter de les unir, et de l’exprimer.
5
Principe d’incertitude. — Plus l’individu en face de toi sait précisément la vitesse de ta pensée, moins il devrait s’efforcer à connaître où tu es. Et plus il évalue correctement ta position, plus il devrait se méfier de l’élan qui le pousse à estimer avec trop de confiance ta célérité. Mais les gens pensent être en mesure d’apprécier complètement ton esprit ! avec leur règle étroite et leurs petits doigts grossiers ! — Peu d’hommes se soucient de ce que peut bien raconter Heisenberg1 : la majorité, et selon l’ange Jesrad, « jugent de tout sans rien connaître2 ».
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Werner Heisenberg, physicien allemand, a formulé le principe d’incertitude en 1926.
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Voltaire, Zadig.
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